"Bien entendu, par la force des choses, il m'est arrivé de-ci de-là de participer à l'agitation générale. Il faut bien vivre paraît-il. Je l'avoue sans honte, j'ai même été jusqu'à gagner de l'argent. Mais j'ai beau faire, toute cette cuisine n'a jamais réussi à m'intéresser. Je dois souffrir d'un manque, être affligé d'un trou quelque part, si j'ose ainsi m'exprimer. Il faut croire qu'il y a malgré tout quelque chose à comprendre que je ne comprendrai jamais. Quand j'écoute au-dedans de moi, ce qui se lève c'est comme le vent, ce qui voyage c'est comme le ciel et parfois la mer (je ne connais pas bien la mer et j'ai toujours eu peur de l'eau), ce qui bouge ce sont des arbres, des lumières, des collines, parfois les mouvements me bercent et parfois ils me bousculent, il y a des soirs où je me sens secoué de petits séismes, et d'autres où des musiques se lovent sous ma peau comme des filles qui glissent dans le sommeil. Je n'accorde en général à ces événements intimes qu'une attention bienveillante mâtinée d'un rien de condescendance attendrie. Je pense que ce sont de légères humeurs, un peu comme des songes de très jeune bébé, des remous d'une mince nostalgie séculaire, et je ne me casse pas la tête.
Ce n'est pas vrai. Je mens comme un dentiste. Et ma tête, non, impossible de raconter ce qui s'y passe."
Jean-Claude Pirotte, Un été dans la combe, 1986.
Un homme arrive dans une cabane abandonnée. D'où vient-il ? Est-il malade, fou ou simplement inadapté aux bruits du monde ? Rêve-t-il ou est-il rongé par les souvenirs ?... C'est toute l'âpre et merveilleuse poésie de J.-Cl. Pirotte (1939-2014).
I lie like a dentist? Remarkable words in all...
RépondreSupprimerMy apologize to the dentists...
Supprimer;-)