dimanche 22 septembre 2019

L'autre jardinier


 Monsieur-qui-pique est au jardin
qui fait cueillette d’ombre
qui danse sous la lune
et prêche aux vers luisants.

Monsieur-qui-trotte aux heures d’encre
entonne les vigiles
il creuse le brouillard
et ronchonne en latin.

Il fait son nid dans tes silences
se musse sous la terre
se vêt de feuilles mortes
se grise de rosée.

Monsieur-qui-gratte est au jardin
qui croque des limaces
qui compte les étoiles
et laboure le temps.

Reste chez toi
voile la lampe
c’est l’heure des chats et du sauvage

ce jardin-là
n’est pas le tien
Monsieur-qui-pique est au jardin.


vendredi 20 septembre 2019

La maison de Colette



 Saint-Sauveur en Puisaye, où rodent encore les chats dans les jardins clos, 
tandis que la glycine continue de tordre les vieilles grilles...




dimanche 15 septembre 2019

Pourquoi le merle


Tu bouscules la cime
où l’ombre s’effiloche

tu frôles le silence

tu congédies la peur

tu éveilles le chant


Le voici               Ton soleil


psalmiste
aux ailes brunes
aux pattes de brindille

vigie du bord de l’aube

petit guetteur d’aurore
ta louange
t’affole

tisse-nous par ta joie
       un manteau
                  pour le jour.

vendredi 13 septembre 2019

Le feu du silence / Jean Lavoué


...
S'en remettre à sa frontière sans limites
Laisser aller la main où la nuit s'interroge
De tout bosquet libérer l'oiseau
S'affranchir de l'encre des mots d'ordre
Panser d'eaux vives nos blessures
Porter en soi un feuillage persistant
Ancrer en soi les racines de l'espérance
Transmettre le silence comme un incendie
Sur toute absence nue lever le voile
En toutes traces sauves saluer la présence
Se tenir à la croisée du Poème
Au bord de l'abîme consentir à la joie.

Jean Lavoué

Souvenir d'une rencontre de silence au carmel de Mazille en ce début septembre.

On pourra avec bonheur fréquenter le blog de Jean : L'enfance des arbres.  

lundi 9 septembre 2019

Silence / Marion Muller-Colard

Trop en trop
et depuis trop longtemps
Les mauvaises choses, toujours en trop
mais aussi les bonnes
Trop de tout

Occlusion cérébrale
sentimentale
spirituelle
Tout mon être
comme une machine lourde
chaque matin
plus difficile
à relancer

(...)

Mais il y a plus vicieux encore :
je m'accoutume

Je m'accoutume à ce trop-plein
que je ne supporte plus
Plus je déborde
plus je remplis

Je suppose qu'on appelle cela
le syndrome de Stockholm
Le trop est mon tortionnaire
mais je le sers docilement
et je m'y accroche
de toutes les forces
 que je n'ai plus

(...)

Heureux êtes-vous
si vous ne voyez pas
 de quoi je veux parler

Si vous ne voyez que trop bien
suivez-moi
j'ai trouvé un jardin


Dans Le plein silence, petit livre écrit en vers libres, la théologienne protestante Marion Muller-Colard relate une expérience de jeûne, d'expérience du silence et de retour sur soi dans un centre jésuite au pied de la Chartreuse. Les délicates aquarelles de Francine Carillo accompagnent ce merveilleux texte, intime, espiègle et poétique, sur la confrontation avec le plus Grand que soi.



Il se peut
je le conçois
qu'à ne plus parler
on entende enfin
ce qui parle
au plus profond de soi

jeudi 5 septembre 2019

Bleu / Maggie Nelson


"1. Et si je commençais en disant que je suis tombée amoureuse d'une couleur. Et si je le racontais comme une confession ; et si je déchiquetais ma serviette en papier pendant que nous discutons. C'est venu petit à petit. Par estime, affinité. Jusqu'au jour où (...) je ne sais comment, ça a pris un tour personnel.

2. Je suis donc tombée amoureuse d'une couleur - la couleur bleue, en l'occurrence - comme on tombe dans les rêts d'un sortilège, et je me suis battue pour rester sous son influence et m'en libérer, alternativement.

3. Qu'en est-il ressorti ? Une illusion choisie, pourrait-on dire. Que chaque objet bleu soit une sorte de buisson ardent, un code secret destiné à un seul agent, une croix sur une carte trop grande pour être entièrement déployée, mais qui contiendrait tout l'univers connu."


Maggie Nelson, Bleuets, Éditions du sous-sol, traduit de l'anglais (USA) par Céline Leroy.


dimanche 1 septembre 2019

Septembre / Barbara


Jamais la fin d'été n'avait paru si belle.
Les vignes de l'année auront de beaux raisins.
On voit se rassembler, déjà les hirondelles
Mais il faut se quitter. Pourtant, l'on s'aimait bien.
Quel joli temps pour se dire au revoir.
Quel joli soir pour jouer ses vingt ans.
Sur la fumée des cigarettes,
L'amour s'en va, mon cœur s'arrête...


Et une si délicate interprétation, signée Camélia Jordana et Alexandre Tharaud, 
de cette belle chanson de Barbara. 

Je vous souhaite un doux mois de septembre...